Pensées en noir et blanc
Je remarque dans la pratique quotidienne, qu’il existe beaucoup d'incertitude sur la disponibilité et l'utilisation d'antibiotiques d'aujourd'hui. J’entends aussi beaucoup de théories qui circulent qui ne sont basées sur rien. Assez pour y mettre quelques nuances.
Lorsque Alexander Fleming a découvert la pénicilline en 1928, pas tout le monde avait compris que cela deviendrait une industrie multimilliardaire par après.
Il faut mentionner que cette découverte était et est encore une aubaine pour la santé humaine et animale.
Les infections qui sont maintenant considérées comme relativement inoffensives, auraient pu, avant cette découverte, conduire à la mort. J'ai moi-même un grand respect pour la découverte de Fleming comme étant enfant, il m'a sauvé la vie, quand j’ai dû passer près de la moitié d'une année à l'hôpital suite à un empoisonnement du sang. La découverte de Fleming a conduit au développement d'un grand nombre d’antibiotiques et des agents chimiothérapeutiques. Pour notre commodité, nous appelons le tout ‘les antibiotiques’, même si ce n'est pas exact. Les tétracyclines tels que la doxycycline et l'oxytétracycline, par exemple, appartiennent à ce groupe d'agents chimiothérapeutiques.
Tous ces produits ont en commun qu’ils rendent la vie très difficile aux bactéries.
Au début, on avait l'illusion que l’on pourrait contrôler tous les agents pathogènes.
Je l’ai lu un article de la fin des années cinquante du siècle dernier, dans lequel un expert déclarait que ceci était une évidence. Avec le recul, nous savons que c'était une affirmation ridicule. Mais notre gouvernement n’a pas reculé à utiliser les connaissances du moment pour l’administration préventive des antibiotiques dans l'alimentation des porcs et des volailles dans la seconde moitié du siècle dernier, parce qu'ils avaient découvert que la production de ces animaux avait augmenté et que donc les gains aussi, augmentaient considérablement.
La critique de cette politique était à ce moment-là à peine tolérée. Les avertissements placés sur cette politique ont été ridiculisés. Mais peu à peu il est devenu clair que les bactéries ne sont pas complètement sans défense et qu’elles ont réussi à trouver une réponse à la surutilisation des antibiotiques sous forme de résistance aux agents utilisés.
Des esprits critiques ont commencés à causer de plus en plus d'agitation.
Lorsque les vétérinaires maintenant âgés étaient encore entassés avec les connaissances des pouvoirs ‘illimités’ des antibiotiques qu’ils avaient reçus pendant leurs études, la prochaine génération de vétérinaires a également appris le revers de la médaille.
Ils ont pris conscience des dangers de la résistance des bactéries suite à une utilisation fréquente d'antibiotiques. Enfin, ils ont fait plus de recherches.
Cette résistance a commencé lentement à causer un problème dans les hôpitaux et dans le traitement des êtres humains.
Aux Pays-Bas l’on a également commencé à développer des réticences à l'égard de l'utilisation de ces ressources. Le gouvernement a installé de plus en plus de règles. Mais ces réglementations n’étaient guère considérés à l'étranger. Et maintenant, il y a encore un grand écart entre la loi telle qu'elle est actuellement aux Pays-Bas et les pays voisins et par exemple les pays de l'Europe du Sud. Ne parlons même pas des pays plus lointains.
Donc, il y a une grande différence dans l'approche de l'utilisation d'antibiotiques entre les divers pays. Et pourtant, le monde devient plus petit. Il est possible de prendre un avion et quelques heures plus tard, vous vous trouvez dans un pays lointain où d’autres règles s'appliquent. Aussi à propos de l'utilisation d'antibiotiques.
Dans la société Européenne, chaque pays, essaye de trouver une solution au problème qui a surgi en ce qui concerne la résistance, et ceci à leur propre rythme.
Ces réglementations varient de règles presques inexistantes à des lois très strictes.
La politique à l'égard des antibiotiques dans les Pays-Bas et les pays environnants est également dans une période de transition. Les règlements concernant l'utilisation d'antibiotiques sont en train de changer totalement. Logiquement, cela conduit à des malentendus et des questions.
Après tout, nous sommes au milieu de ce processus.
La politique que l'on tient aux Pays-Bas peut être recueillie dans le cadre du groupe de réglementations plus strictes si l'on la compare aux règlements de la planète dans son ensemble.
En 1987, la première loi sur les médicaments vétérinaires a été introduite.
Il a été convenu que tous les médicaments vétérinaires utilisés dans les Pays-Bas devaient être enregistrés. Donc aussi les antibiotiques. Le but était évidemment de voir plus clair dans la prolifération des produits divers qui avaient vu le jour les décennies précédentes.
Pour les espèces d’antibiotiques dites mineurs, cependant, l’on a fait une exception. Cela signifie que s’il y avait moins de 5% d’antibiotiques dans un pot, qu’il pourrait être vendu librement.
Tout cela était à ce moment-là, bien sûr, une décision purement politique. Puisque ces pots à 5% ont causés encore plus de résistance, la même résistance que l’on peine à battre en ce moment. Les dosages de ces antibiotiques utilisés étaient souvent trop faibles pour tuer efficacement toutes les bactéries nocives. Toutefois, cette règle a existé pendant 25 longues années. Cette exception n'a été levée que le 1er Janvier de cette année et les pots à 5 % d’antibiotiques ne pouvaient plus être vendu librement. Ce devint un malentendu dans le monde. Nombres de vétérinaires ont été approchés par des clients demandant si, dorénavant, les antibiotiques ne pourraient plus être émises.
Jusqu'à présent, ce n'est pas (encore ) le cas. Ce principe n’avait en fait rien à voir avec l’autre.
Les événements de la santé publique dans les années nonante du siècle dernier et les premières années de ce siècle, ont préparés les esprits et l’opinion publique pour une nouvelle intervention. Tout le monde était convaincu que des situations telles que les bactéries SARM et EHEC étaient tout à fait indésirables. L’on allait devoir prendre des mesures.
Les politiciens ont pris la responsabilité et ont conçus ‘l’Autorité des antibiotiques’ qui devrait décider des derniers règlements de l'utilisation d'antibiotiques. Ce groupe est en train de mener la révolution qui se déroule actuellement à propos des médicaments.
La politique a dicté, suite aux dangers qui menacent la santé publique et la sécurité alimentaire, qu'il devrait y avoir une réduction drastique de l'utilisation des antibiotiques chez les humains et les animaux. En occurence, l’on a mis la santé publique en premier lieu, la santé de la nourriture à la deuxième place et la santé animale à la troisième place.
Purement rationnel ce n'est que justifiable. Mais en pratique, il est parfois difficile à avaler pour un vétérinaire, sachant que vous êtes formé pour la guérison des animaux, que cette tâche est devenu subordonné à d'autres questions et d’intérêts.
Le secteur dans lequel la réduction de l'utilisation des antibiotiques dans un court laps de temps a été effectué avec succès, était dans l’industrie bio.
Au cours de la conférence annuelle de l'Association Vétérinaire, le ministre a également salué la réalisation d’une réduction de 50% en moins de deux ans. Malheureusement, elle avait aussi une communication moins agréable. Il faut encore réaliser 40% de réduction. Cela signifie en pratique que ce plan sera difficilement réalisable même sans sacrifices, dans le sens que l’on ne pourra plus préscrire le médicament le plus approprié pour les animaux lors d’une maladie. Les autres espèces animales ne seront plus épargnées non plus.
Un exemple pour clarifier cela. Afin de donner à la réduction de l'utilisation des antibiotiques un coté pratique, L’Autorité des antibiotiques, a mis au point une classification des agents anti- bactériennes classées en premier, deuxième et troisième choix.
Ainsi, l'utilisation des deux derniers groupes ne sont possibles que sous certaines conditions. Les conditions les plus strictes s'appliquent aux médicaments du troisième choix (par exemple le Baytril).
Lorsque ces règlements en 2012 étaient seulement appliqués au secteur de l'élevage, en 2013 ils s'appliquent également aux animaux de compagnie.
Les vétérinaires sont en train d’adapter leurs traitements habituels de façon drastique à ces nouveaux règlements.
Que cela puisse conduire à des malentendus sera clair.
Ainsi, par exemple, un amateur m’a déclaré qu’il était honteux que son vétérinaire habituel où il a acheté le Baytril pendant des années pour guérir la paratyphoïde, ne voulait plus le lui préscrire. J’ai dû alors lui expliquer calmement que le vétérinaire souhaite seulement suivre les réglements instaurés par le gouvernement. Qu’il n’y avait pas de honte. Que la liberté d'action que les vétérinaires connaissaient en ce qui concerne l'utilisation d'antibiotiques n'est plus.
Un autre colombophile m'a demandé pourquoi le Trimsulfa pouvait être préscrit pour la paratyphoïde et plus le Baytril. Cela a à voir avec le fait que le Trimsulfa est un agent de premier choix et qu’il est, par conséquent, soumis à une approche différente.
Donc, il y a beaucoup de changements devant la porte, qui sont déjà partiellement mis en place. Mais qu'est-ce que cela signifie pour notre sport colombophile?
Tout d'abord, la loi actuelle exige que seulement les médicaments vétérinaires enregistrés peuvent être utilisés.
S’ils n’existent pas pour une condition particulière de l’animal, l’on peut puiser dans les médicaments d'autres espèces animales.
Y at-il un problème spécifique qui ne peut être résolu par un des produits dans ceux-là, un vétérinaire a ( encore ) le droit de préparer lui-même un médicament Magistral.
Actuellement, l’on a également ajouté une restriction rigoureuse de l’utilisation des antibiotiques du deuxième et troisième choix.
Tout cela sous peine de sanctions graves.
Pour de nombreux amateurs, ces règles seront difficiles à digérer. Mais les choses deviennent de plus en plus une réalité.
En Belgique et en Allemagne l’on est également obligé à suivre ces règles de plus en plus restrictives concernant l'utilisation d'agents antibactériens.
Avec ceci, chaque pays a également ses propres priorités. C'est pourquoi il est encore plus difficile à comprendre pour de nombreux colombophiles d’envergure internationale.
Depuis les années ’80 du siècle dernier, je travaille sur le développement des ressources naturelles qui peuvent être utilisés pour empêcher que les oiseaux deviennent malades. Ces idées ont toutefois été ridiculisés par de nombreux collègues pendant des années.
Après tout, il était beaucoup plus facile de guérir avec des médicaments que de prendre des suppléments pour devancer les maladies. Le paradigme, cependant, a totalement changé depuis.
La prévention de la maladie est désormais un ‘must’, parce que les ressources qui peuvent être utilisées pour soigner les animaux malades menaçent toujours de devenir moins accessibles aux médecins (dans l'intérêt de la santé publique). Oui, il y aura des médicaments que l’on pourra encore utiliser pour traiter les animaux.
Mais la question est de savoir si les problèmes spécifiques que les pigeons montrent parfois pourront être combattus éfficacement avec les produits qui nous restent.
Je crois toujours que les vétérinaires devraient garder le droit de continuer à travailler avec certains produits lors des cas graves spécifiques, sans risquer des sanctions.
Le temps nous apprendra s’il y aura des problèmes avec ces réglements ou pas.
Mais personne veut voir le gris entre le noir et blanc, j’en ai peur.
Bonne chance,
Peter Boskamp